Se chauffer au bois est-il bon pour le climat ?
Bibliothèque multimédia intercommunale d’Épinal – notre réponse du 10/06/2022.
La France représente le 1er pays européen utilisateur de bois énergie.
Chauffage confortable, moins onéreux que les autres énergies du marché tels que le gaz ou l’électricité, le chauffage au bois est souvent considéré comme une solution de chauffage écologique. Qu’en est-il vraiment du bilan carbone lorsqu’on se chauffe au bois ?
Bilan carbone du chauffage au bois : de quoi parle-t-on ?
L’Agence de l’Environnement et de la Maîtrise de l’énergie (ADEME) a proposé en 2004 un outil qui permet de comptabiliser les émissions de Gaz à Effet de Serre (GES) engendrées par une activité : le bilan carbone.
Cette méthode peut être adaptée aux combustibles utilisés pour le chauffage.
Elle distingue 2 types de « facteurs d’émissions » :
-les émissions « en amont » concernent l’extraction, le transport et le raffinage du combustible
-les émissions « de combustion », liées à la combustion du carburant (les émissions en sortie de la chaudière).
Selon cette méthode la plaquette bois en chaufferie rejette 0,015 kg équivalent de C02 par kWh produit. Par comparaison avec d’autres moyens de chauffage, le bois est largement moins producteur de CO2 que d’autres combustibles.
Source :
L’intérêt carbone du chauffage au bois par Olivier PAPIN – Ingénieur INSA Energie Environnement, le 03/05/2021.
Si le bilan carbone du bois est faible, il n’est pas nul, contrairement à ce qu’on peut lire souvent : la production du bois prêt à être utilisé comme combustible (abattage, traitement, conditionnement, transport) ainsi que la production et l’entretien des centrales biomasse, chaudières, et fourneaux où il est brûlé émettent du CO2 « en amont ».
Seule la partie « combustion » du bilan carbone du bois peut être considérée comme nulle. En brûlant du bois, on libère en effet dans l’atmosphère la quantité de CO2 qu’il a absorbée : le bilan de l’émission est donc neutre.
Cela se vérifie cependant uniquement dans le cas où « la biomasse utilisée pour la combustion est gérée durablement et provient de gisements de proximité »
Source :
L’impact du chauffage au bois sur la qualité de l’air sur le site de la Direction régionale et interdépartementale de l’environnement, de l’aménagement et des transports de l’Ile-de-France, mis à jour le 15/09/2021.
Le chauffage au bois contribue au changement climatique via le site indépendant notre-planete.info, mis à jour le 02/11/2021.
Extrait :
« L’exploitation de la biomasse pour se chauffer est toujours présentée comme un moyen neutre, moderne, voire écologique de répondre à l’urgence environnementale et climatique. Et pourtant, couper des arbres pour les brûler n’est pas une solution acceptable face à l’urgence climatique actuelle.
Une nouvelle publication de l’European Academies Science Advisory Council (EASAC : European Academies Science Advisory Council), une structure européenne collaborative et bénévole d’aide à la décision en matière de science, met en garde contre les prétendus bienfaits environnementaux du chauffage au bois.
Ces dernières années, la production mondiale de granulés de bois utilisant la biomasse forestière comme matière première a augmenté avec une production qui a atteint 24 millions de tonnes en 2019, ce qui correspond à environ 50 millions de mètres cube de bois (Outlook for Wood Pellets, 2019). »
Le chauffage au bois, dangereux pour la santé ?
Le chauffage au bois, dangereux pour la santé et pour l’environnement par un collectif, www.liberation.fr, le 17/04/2021.
Extrait :
« La combustion du bois est la source la plus émettrice de polluants toxiques pour la santé. Les particules émises par la combustion du bois sont les plus nocives, semblables en termes de composition aux particules diesel (fioul de chauffage et gazole routier), notamment en raison des hydrocarbures aromatiques polycycliques (HAP) extrêmement cancérigènes qui entrent à la fois dans la composition des particules fines mais également des gaz émis par la combustion du bois. La combustion du bois peut émettre jusqu’à 35 fois plus de HAP cancérigènes que le fioul domestique, et bien plus encore comparativement à la combustion du charbon ou du gaz.
En plus de leur caractère cancérigène, ces particules carbonées sont également les plus toxiques pour les systèmes respiratoires, cardiovasculaires ainsi que pour le développement du fœtus. La combustion du bois est également à l’origine d’autres polluants toxiques, notamment des composés organiques volatils, cancérigènes également. »
Pollution atmosphérique : les enjeux de la filière bois-énergie par l’Ineris (‘Institut national de l’environnement industriel et des risques )
Extrait :
« Le chauffage au bois contribue notamment à la pollution particulaire, qui crée des risques pour la santé des populations (maladies respiratoires et cardio-vasculaires). Le chauffage est à l’origine de l’émission de particules primaires, qui sont directement émises dans l’air par la source de pollution. Il est également responsable de l’émission de polluants (appelés « précurseurs ») qui donnent naissance, par réactions chimiques et photo-chimiques dans l’air à des particules « secondaires » différentes des émissions d’origine. Les émissions de chauffage au bois représentent pour le secteur résidentiel / tertiaire environ un tiers des émissions totales de particules (PM10), près de la moitié des émissions totales de particules fines (PM2,5), et les deux tiers des émissions totales d’hydrocarbures aromatiques polycycliques dont le Benzo(a)pyrène (BaP), reconnu cancérigène pour l’homme (source Citepa). Par ailleurs, la combustion de bois émet du monoxyde de carbone (CO), des composés organiques volatils (COV) tel que le benzène également reconnu cancérigène pour l’homme, des oxydes d’azote (NOx)
Le chauffage au bois, dangereux pour l’environnement ?
Le journal Libération rapporte que des savants du Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC) ont adressé dans la revue Nature un message à l’Union européenne pour alerter sur le danger du développement industriel des forêts européennes, qui ne permet pas de compenser l’augmentation des émissions de CO2 liées au développement des centrales et chauffages au bois. Ils « estiment que, si rien n’est fait, la filière bois énergie sera responsable, à elle seule, d’un accroissement de 10 % des gaz à effet de serre dans les dix prochaines années. »
Source :
Le chauffage au bois, dangereux pour la santé et pour l’environnement par un collectif, www.liberation.fr, le 17/04/2021.
Ces craintes sont corroborées par des chercheurs, qui grâce à l’analyse de données satellitaires, ont repéré une augmentation annuelle de 49 % de la superficie forestière récoltée ainsi qu’un surcroît annuel de 69 % de perte de biomasse en Europe pour la période 2016-2018 par rapport à 2011-2015. « Cette réduction des forêts pourrait avoir un impact sur le climat, dans la mesure où les arbres coupés ne peuvent plus capter le dioxyde de carbone, l’un des gaz à effet de serre responsables du réchauffement climatique » affirme le journal Courrier international qui rapporte les conclusions de leur étude publiées dans la revue Nature.
Source :
Déforestation. L’abattage des arbres a bondi en Europe depuis 2015 par New Scientis, le 02/07/2021.
Plan d’action du gouvernement et sensibilisation
La loi Climat et Résilience impose désormais dans les zones PPA, d’ici le 1er janvier 2023, que les préfets prennent les mesures nécessaires afin de réduire de 50 % les émissions de PM2,5 issues du chauffage au bois à horizon 2030 par rapport à la référence 2020.
Source : Réduction des émissions issues du chauffage au bois en France sur le site gouvernemental www.ecologie.gouv.fr
Issue des travaux de la Convention citoyenne pour le climat, la loi portant lutte contre le dérèglement climatique et le renforcement de la résilience face à ses effets a été promulguée et publiée au Journal officiel le 24 août 2021.
Communication pour plus de sensibilisation à la réduction des émissions issues du chauffage au bois
L’ADEME avec le Ministère de la Transition écologique et de la cohésion des territoires, relance la campagne « Chauffage au Bois Performant – Chaque geste compte », pour sensibiliser les Français aux enjeux sanitaires de la qualité de l’air et encourager le changement de comportement des utilisateurs de chauffage domestique au bois afin de réduire les émissions polluantes liées à ce mode de chauffage.
Une campagne multicanaux pour valoriser les gestes qui comptent
Cette campagne est développée dans le cadre du plan national de réduction des émissions issues du chauffage au bois en France et du plan national de sobriété et de la campagne associée « Chaque geste compte ». Elle répond à la fois aux problématiques d’amélioration de la qualité de l’air extérieur mais également au développement des énergies renouvelables, contribuant à rendre la France plus autonome d’un point de vue énergétique.
Elle s’articule autour de trois canaux majeurs : la radio, la presse et le digital avec un spot, des encarts presse et des contenus sur les réseaux sociaux (bannières, GIF, etc…) sous la baseline « On peut se chauffer au bois et bien se chauffer au bois ».
Source :
Nouvelle campagne : chauffage au bois performant, presse.ademe.fr, le 06/12/2022.
En conclusion, le chauffage au bois, encouragé par les politiques nationales ou internationales qui considèrent d’emblée la ressource bois comme renouvelable, n’est pas exempte de menaces sur le climat. Dans le cas d’un chauffage au bois individuel utilisant des ressources jeunes et proches, il ne fait aucun doute que l’effet sur le climat est faible. Par contre l’exploitation industrielle de bois ancien pour produire des granulés qui seront utilisés dans une chaufferie lointaine compromet les objectifs fixés par les COP (Conférence des Parties). Par ailleurs, le chauffage au bois présente des dangers pour la santé, la combustion du bois étant une source émettrice de nombreux polluants toxiques.
Pour aller plus loin…
À télécharger :
Guide pratique : se chauffer au feu de bois proposé par l’ Ademe (Agence de la transition écologique)