Pourriez-vous m’en dire plus au sujet des « śarīra » ?
Médiathèques de la Ville et de l’Eurométropole de Strasbourg – notre réponse actualisée le 10/04/2024.
Si vous vous intéressez à l’histoire et à la pensée bouddhistes, peut-être avez-vous déjà lu ou entendu le mot « śarīra ». Quelle est sa signification ? Les bibliothécaires Eurêkoi vous proposent d’en découvrir en détail la définition.
Définition de « śarīra »
Le terme śarīra vient du sanskrit. Généralement, il signifie « corps ».
« śarīra [śṝ-īra] m. N. corps humain, personne ; vie | Phil. [Vedānta] le corps physique périssable, l’un des 3 corps formé par les 5 enveloppes [kośa] de l’âme ; cf. kāraṇa, sūkṣma, sthūla »
Héritage du Sanskrit : dictionnaire sanskrit-français de Gérard Huet, 2024.
Dans son usage courant, le terme śarīra sert à désigner des reliques du culte bouddhiste.
« reliques, SK. śarīra, PAL. Sārira, TIB. Sku-gdung, ring-bsrel, JAP. shari.
Fragment du corps, corps complet ou objet ayant appartenu à un être éveillé ou un saint, pieusement conservé pour devenir l’objet d’un culte. »Dictionnaire encyclopédique du bouddhisme de Philippe Cornu, éd. Seuil, 2006.
Des reliques bouddhiques
Dans Les objets de la mémoire pour une approche comparatiste des reliques et de leur culte (éd. Peter Lang, 2005), les historiens Philippe Borgeaud et Youri Volokhine expliquent ce que sont les śarīra dans le bouddhisme :
« Les reliques corporelles bouddhiques sont principalement des produits de la crémation. Il s’agit parfois d’un morceau intact de la dépouille ayant résisté au feu (dent, fragment d’os) mais le plus souvent on trouve dans les cendres un ou des sarira (ou sharira, ch. sheli), petit objet qui se forme lors de la crémation, d’une extrême dureté et semblable au diamant. Il n’existe pas de forme ni de taille spécifique au sarira, mais sa caractéristique majeure est de pouvoir émettre de la lumière, ce qui en fait un objet miraculeux. Seul le corps des saints produit des sarira, aussi les disciples et fidèles sont-ils très anxieux, depuis des siècles et encore aujourd’hui, de fouiller les cendres au terme de la crémation en espérant y trouver les sarira qui prouveront la sainteté de leur maître. L’une des caractéristiques les plus frappantes des sarira est leur aspect « anonyme » : ces reliques se ressemblent toutes entre elles, et sont miraculeuses en elles-mêmes, sans rapport étroit avec le saint dont elles proviennent.
Généralement, les śarīra sont conservés dans des stūpas.
« Le stūpa, bâtiment bouddhiste par excellence, symbolise la présence du Bouddha dans notre monde. Son culte fut initié par l’empereur Ashoka, au IIIe siècle av. J.-C., qui en fit ériger un grand nombre dans le royaume. Dans chacun d’eux, il déposa plusieurs reliques du Bouddha, placées dans des coffrets scellés sous le dôme central. »
Bouddha : histoire d’un homme, rencontre d’une présence de Fabrice Midal, éd. Seuil, 2021.
« La présence de sarira est généralement considérée comme nécessaire pour la consécration d’un stupa, la fonction première de cet édifice étant de servir de reliquaire, même si bien d’autres usages en furent fait par la suite; cependant, il est possible d’y mêler des reliques ayant appartenu à divers bouddhas ou saints plus ou moins bien identifiés. Au demeurant, une relique placée dans un stupa devient invisible et inaccessible, le plus souvent placée, en Chine, dans une chambre souterraine. »
Les objets de la mémoire pour une approche comparatiste des reliques et de leur culte de Philippe Borgeaud et Youri Volokhine, éd. Peter Lang, 2005.
Les śarīra de Bouddha
Les śarīra de Bouddha sont considérés comme les śarīra les plus sacrés du bouddhisme.
« Le corps de Buddha a été brûlé dans une sorte de marmite en fer et non dans un cercueil en bois sur un bûcher funéraire. Les restes du corps ne sont donc pas apparus comme des cendres mais comme des fragments d’ossements semblables à des joyaux-gemmes ou des perles lumineuses, transparentes ou translucides, comme des grains de riz blanc décortiqué, des grains de sable. En Chine, ils sont qualifiés de diamant ou d’or pour symboliser leur caractère indestructible et pérenne.
Les objets de la mémoire pour une approche comparatiste des reliques et de leur culte de Philippe Borgeaud et Youri Volokhine, éd. Peter Lang, 2005.
« Après l’incinération, les huit rois des régions environnantes, qui correspondaient symboliquement à toutes les directions de l’espace, se disputèrent les cendres et les reliques du Bouddha. La tradition veut que les reliques de son corps aient été partagées entre huit royaumes et donc universellement distribuées. Placées dans des vases au cœur des stūpas ou tumulus, elles assurent la continuité de la présence, tant corporelle que spirituelle, du maître disparu. »
Bouddha : histoire d’un homme, rencontre d’une présence de Fabrice Midal, éd. Seuil, 2021
Pour aller plus loin…
Si vous souhaitez en savoir plus sur le bouddhisme, nous vous conseillons les ouvrages suivants :
Le vocabulaire du bouddhisme de Stéphane Arguillère, éd. Ellipses, 2023.
Résumé :
Une introduction au bouddhisme à travers la présentation d’une physionomie d’ensemble de cette philosophie et la définition de 34 notions de la pensée bouddhique.
Une introduction au bouddhisme de Chad Mercee, traduit par Audrey Dinghem, éd. Marabout, 2021.
Résumé :
Une initiation au bouddhisme accompagnée de quelques pratiques bouddhistes, comme la méditation en pleine conscience ou la méditation de la bonté bienveillante.
Nous vous recommandons également le podcast Qu’est-ce que le bouddhisme ?, Les Chemins de la philosophie, Radio France, 2019 :
Épisode 1/4 : Une philosophie du bonheur ? Philippe Cornu, spécialiste du bouddhisme et de l’histoire des religions.
Épisode 2/4 : Qui était le Bouddha ? avec Marc Ballanfat, traducteur depuis le sanskrit et spécialiste des philosophes de l’Inde ancienne.
Épisode 3/4 : La tradition zen : pourquoi méditer ? avec Eric Rommeluère, bouddhiste et écrivain.
Épisode 4/4 : L’avenir appartient à ceux qui s’éveillent tôt avec Alexis Lavis, philosophe et professeur à l’Université Renmin de Pékin.
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