Bibliothèque publique d’information – notre réponse actualisée le 18/10/2024.
Objet du quotidien dont on ne remarque plus la présence, le miroir constitue à la fois un élément décoratif et utilitaire utilisé notamment dans la salle de bain pour de nombreuses tâches comme la toilette, l’habillage, ou la vérification de l’apparence.
Le miroir reflète, mais est-il vraiment fidèle à ce que nous sommes ? Pourquoi parfois avons-nous l’impression que le miroir renvoie une image de nous différente de celle perçue par les autres ?
Éléments de réponse avec les bibliothécaires Eurêkoi.
L’effet d’inversion horizontale du miroir et son effet sur la perception
Un miroir nous montre une image inversée horizontalement, c’est-à-dire que ce que nous voyons à gauche dans le miroir est en réalité notre côté droit.
Explication accompagnée de schémas : Pourquoi un miroir n’inverse-t-il pas le haut et le bas ? par Franck Stevens, vulgarisation-scientifique.com, le 03/11/2013.
Notre cerveau est ainsi habitué à voir notre propre reflet chaque jour. Cette habitude crée une image de nous-mêmes ancrée dans notre esprit, légèrement différente de ce que les autres perçoivent car les gens autour de nous voient notre visage tel qu’il est, sans cette inversion.
Par exemple, lorsque nous regardons une photo de nous-mêmes, cette image non-inversée peut sembler « étrange » car notre cerveau est conditionné à voir une version inversée, créant une légère dissonance cognitive.
Le biais de familiarité
Figure centrale de la psychologie sociale expérimentale, le psychologue Robert Zajonc a décrit ce phénomène comme l’effet de simple exposition (« mere-exposure effect »). Plus on est exposé à une image (comme notre reflet), plus on la trouve familière et, souvent, plus on la trouve agréable. Ainsi, nous préférons généralement notre image dans le miroir à une photo, car nous y sommes plus habitués, même si la photo est la véritable représentation que les autres voient.
Notre image dans le miroir résultat d’une construction de soi
Les étapes de la reconnaissance de soi devant le miroir par Boulanger-Balleyguier Geneviève, in: Enfance, tome 20, n°1, 1967. pp. 91-116. Disponible en ligne sur la base en Open Access Persee.fr.
Extrait :
Or les études de psychologie enfantine ont montré que la conscience de soi se construit peu à peu, et que la connaissance de soi est plus tardive que celle d’autrui. Bien que d’autres auteurs (Preyer, Baldwin, G. Mead) y aient déjà fait allusion, c’est surtout Wallon qui a insisté sur le fait que cette prise de conscience objective de soi-même se forme progressivement. La notion du corps propre, le schéma corporel, s’acquiert pendant la première année, à la suite des expériences de l’enfant sur son corps (il commence dès 4 mois à regarder ses mains en les faisant bouger, ensuite il suce ses pieds) et de la comparaison entre autrui (les parties de son visage, qu’il regarde et
touche) et lui-même.
On ne se voit jamais comme on est par Laurence Lemoine, Psychologies.com, le 09/05/2019.
Extrait :
Pourquoi ne nous voyons-nous jamais tels que nous sommes ? Je suis allée interroger J.-D. Nasio*, psychanalyste, spécialiste de la notion d’image du corps. Pour lui, notre perception de nous-même ne peut qu’être fausse, « déformée par nos émotions, nos souvenirs d’enfance et le regard des autres ».
Cet hiatus inévitable, entre notre être de chair et d’os et l’image que nous en avons, nous fait parfois souffrir. Nous ne voyons souvent que nos défauts, nous nous inventons des tares. Pour nous réconcilier avec notre enveloppe, il faut en général en passer par une exploration des fantasmes que nous entretenons à son propos.
*Pour approfondir : Mon corps et ses images de Juan David Nasio, Éditions Payot, 2007.
Résumé :
Il existe deux sortes d’images du corps : celle reflétée par le miroir, et celle des ressentis internes à travers la pensée de deux figures majeures de la psychanalyse : Françoise Dolto et Jacques Lacan.
Pour aller plus loin…
Le miroir noir : enquête sur le côté obscur du reflet de Arnaud Maillet. Paris : Kargo & l’éclat, 2005.
Résumé :
Le miroir noir, un miroir convexe au tain noir, fut utilisé en peinture durant les XVIe et XVIIe siècles. Pourtant, il est peu cité dans les traités de peinture et il est difficile d’en trouver des exemplaires aujourd’hui, car il a longtemps été lié à des pratiques magiques, notamment la catoptromancie. Retrace l’histoire de cet objet, histoire à la fois artistique, scientifique et philosophique. Contribution à l’histoire de la culture visuelle occidentale.
Miroirs – Reflets : esthétiques de la duplicité : [colloque international organisé par le Centre de recherche sur l’Europe littéraire, Université de Haute-Alsace, les 9 et 10 mai 2002] sous la direction de Peter André Bloch et Peter Schnyder, Presses universitaires de Strasbourg, 2003.
Présentation :
Ouvrage d’esthétique et de littérature, le volume constitue une réflexion approfondie et éclectique sur la notion de miroir. Le miroir est envisagé ici comme métaphore littéraire, mais aussi dans sa dimension psychologique, comme instrument du narcissisme. Des multiples approches du livre se dégage une conclusion évidente : le miroir est ce qui ne se laisse jamais vraiment approcher, ce qui trahit plutôt qu’il ne révèle, en un mot ce qui dépasse à jamais toute tentative de représentation et de réduction.
Histoire du miroir de Melchior-Bonnet, Sabine. Imago, 1994.
Résumé :
Longtemps rare, cher et précieux, le miroir est aujourd’hui un élément banal du décor domestique ou urbain.
Son histoire est aussi celle du rapport de l’homme à sa propre image et à son double.
Cet ouvrage explore les multiples aspects d’un symbole et retrace l’étonnante influence d’un objet familier sur notre sensibilité.