La ligne du Taurus-Express allait-elle de Tripoli jusqu’au Caire ?
Bibliothèque de l’Institut du Monde Arabe – notre réponse du 24/02/2023 actualisée le 12/03/2024.
Les voyageurs qui prenaient place à bord du Simplon-Orient-Express entreprenaient un long périple qui les menait jusqu’à la pointe de l’Europe, à Istanbul en Turquie. Comment continuer son voyage vers la Syrie, la Palestine et l’Egypte ? Nous vous proposons de partir à la découverte du Taurus-Express, ce mystérieux train qui permettait de sillonner tout le Moyen-Orient.
À la découverte du Taurus-Express
La création du Taurus-Express
Le Moniteur des consulats et du commerce international : littérature, sciences, arts du 01 février 1930 évoque la mise en service du Taurus-Express le 15 février 1930 :
« Un nouveau service combiné par train de luxe, wagons-lits et automobiles, va donner la possibilité, à partir du 15 février, de se rendre directement de Londres et de Paris à Bagdad en huit jours. Cette nouvelle relation utilise le Simple-Orient-Express jusqu’à Stamboul, puis un nouveau train dénommé Taurus-Express, depuis la rive asiatique du Bosphore jusqu’à Nissibine, via Konia et Alep. […] Le Simple-Orient-Express et le Taurus-Express comportent des places de wagons-lits de 1ère et 2ème classes : entre Calais, Paris et Stamboul, les premières classes sont des compartiments « singles ». »
Le Moniteur des consulats et du commerce international : littérature, sciences, arts du 01 février 1930 mentionne aussi les raisons de sa création :
« D’autre part, la création du Taurus-Express va améliorer sensiblement la relation déjà existante entre Londres, Paris et Le Caire par voie de terre : le trajet direct de bout en bout durera sept jours au lieu de huit. Cet itinéraire présente un très grand intérêt touristique, et permet aux voyageurs qui s’arrêtent en cours de route de visiter la Turquie, la Syrie et la Palestine, avant de se rendre en Egypte. »
L’itinéraire du Taurus-Express
Les villes desservies par le Taurus-Express étaient les suivantes :
« Taurus-Express : train accéléré trihebdomadaire.
Haydarpasa, Adana, Alep, Nissibin, Mossoul, Kirkuk, Bagdad, Bassorah, Alep, Homes, Rayak, Beyrouth, Haïfa, Kantara, Cairo.
Wagons-lits de 1ère classe et de 2ème classe.
D’Istanbul à Haydarpasa, vedette spéciale pour la traversée du Bosphore.
Services automobiles de Nissibin à Mossoul et Kirkuk / de Rayak à Beyrouth et Haïfa. »Simplon-Orient-Express ; Taurus Express et leurs branches correspondantes. Années 1930-1931, éd. Barreau (Paris), 1930.
Le Taurus-Express prenait la suite du Simplon-Orient-Express et permettait de poursuivre son voyage de l’autre côté du Bosphore, vers l’Orient, en passant par la chaîne des monts Taurus.
« Ce train est en correspondance directe trois fois par semaine avec le Simplon-Orient-Express. La route suivie passe par Eskisehir, qui possède plusieurs mosquées construites du temps des Seldjoukidès, ainsi qu’un bain thermal à 42°C : Afyon (anciennement Achronéos) remarquable par sa citadelle qui a une hauteur de 120 mètres et est construite sur une montagne cunéiforme ; Konya, ville historique qui fût l’ancienne Ikonium, cité remarquable par ses monuments Seldjoks. Ses principaux monuments sont : les mosquées d’Alaeddine, de Karatay, de Sahib Ala, d’Indjé-Minaré, etc. La ligne se glisse ensuite entre les hautes terres de la chaîne du Taurus. […] D’Alep, la ligne se bifurque en deux pointes : Alep-Nissibin et Alep-Rayak. »
Simplon-Orient-Express ; Taurus Express et leurs branches correspondantes. Années 1930-1931, éd. Barreau (Paris), 1930.
Le voyage de Tripoli au Caire
Selon la brochure Simplon-Orient-Express ; Taurus Express et leurs branches correspondantes. Années 1930-1931, la ligne du Taurus-Express commençait à Haydarpasa, puis se séparait à Alep en une branche vers Tripoli/Rayak et une branche vers Nissibin. Cependant, il était possible d’aller de Tripoli au Caire en empruntant des services automobiles de Tripoli à Haïfa et une ligne de train adjacente de Haïfa au Caire.
« En quittant Alep, la voie normale se dirige vers Hama, sur l’Oronte, Homs point de bifurcation vers Tripoli, et descend vers Baalbek (ancienne Héliopolis) joyau de la magnifique plaine de Békaa, entre les deux montagnes du Liban et de l’Anti-Liban, pour terminer à Rayak, à mi-chemin de Beyrouth et Damas que l’on peut rejoindre soit par auto, soit par chemin de fer à voie étroite. De Beyrouth, le voyage se continue en automobile vers Haïfa, tête de ligne vers Jérusalem, Kantara sur le canal de Suez, et Le Caire. »
Vous pouvez également consulter les cartes présentes dans cette même brochure qui est disponible en ligne sur le site web BnF Gallica :
Simplon-Orient-Express ; Taurus Express et leurs branches correspondantes. Années 1930-1931, Barreau (Paris), 1930.
Le Taurus-Express aujourd’hui
Aujourd’hui, le Taurus-Express n’est plus en activité en raison de l’instabilité et des conflits dans la région.
Un ancien employé de la compagnie internationale des wagons-lits, Hrant Der Manuelian, se souvient de l’âge d’or du Taurus-Express dont le patrimoine ferroviaire est actuellement laissé à l’abandon au Liban.
Bagdad : Dix ans plus tard, le Taurus express n’est plus que l’ombre de lui-même par Raad Al-Jammas/AFP, Arabnews, 28/07/2020.
« Au gré de la géopolitique et des conflits, le trajet du Taurus Express qui reliait depuis le début du XXe siècle Bassora, à la pointe sud de l’Irak, à la Turquie, dans le prolongement du célébrissime Orient-Express –Paris-Vienne-Istanbul– s’est réduit comme peau de chagrin. De Mossoul, où le trafic ferroviaire a drastiquement baissé après l’invasion américaine de 2003, deux trains ont continué à partir chaque semaine, direction Gaziantep en Turquie. Jusqu’à un jour de l’été 2010 et un aller-simple pour cette localité du sud de la Turquie. »
Pour en savoir plus…
Nous vous invitons à consulter l’article Le mystérieux « Taurus-Express » : plus loin que l’ « Orient-Express » disponible sur le blog très bien renseigné de l’historien Clive Lamming.
Extrait :
« On ne le sait que trop : l’« Orient-Express », le « vrai », celui de 1883 à 2009, n’était pas un express et n’allait pas en Orient ! Il terminait sa longue course à la pointe extrême de l’Europe, dans la gare bien européenne de Sirkeci à Istanbul, et n’allait pas plus loin. Il n’y avait aucun tunnel ferroviaire pour traverser le détroit et atteindre l’Asie, juste en face. Le voyageur désireux de continuer son voyage et d’atteindre l’Orient devait prendre ses valises et traverser le Bosphore sur un bac et aller prendre le « Taurus-Express » dont les deux voiture-lits (et la voiture-restaurant jusqu’à Alep) attendent en gare de Haydarpasa. »