Bibliothèque publique d’information – notre réponse du 28/04/2023.
Il n’est pas rare que deux disciplines artistiques a priori distinctes finissent par se rencontrer sous l’impulsion d’un auteur, d’un plasticien ou d’un musicien. La comédie-ballet, par exemple, résulte de la rencontre entre l’art théâtral, l’art musical et l’art chorégraphique ; la bande-dessinée, quant à elle, a su exploiter efficacement l’alliance entre le texte et le dessin.
Parmi les divers croisements disciplinaires existants, la rencontre entre la danse et la littérature pose particulièrement question. Est-il possible d’allier un art de l’écrit et un art du corps ?
Quels rapports, quelles affinités peuvent entretenir ces deux disciplines, alors même qu’elles passent par des langages foncièrement dissemblables – celui des mots pour la littérature, celui du corps pour la danse ?
Les écrivains et la danse : un engouement partagé par les auteurs du XVIIe au XXe siècle
La figure de la ballerine au XIXe siècle
Les écrivains n’ont pas hésité à intégrer des personnages de danseurs et danseuses à leurs intrigues. Aussi la figure de la ballerine apparaît-elle dans nombre d’ouvrages littéraires, en particulier au XIXe siècle. Dans un essai particulièrement dense paru en 1996 chez Honoré Champion, intitulé Corps et graphies : poétique de la danse et de la danseuse à la fin du XIXe siècle, Guy Ducrey revient en détails sur la manière dont les auteurs – aussi bien naturalistes que symbolistes – se sont emparés de cette figure, tantôt objet de fantasmes, tantôt de mépris.
Alice Godefroy, quant à elle, s’intéresse à la disparition dudit personnage dans les œuvres littéraires du siècle suivant. Également publié aux éditions H. Champion en
2015, son ouvrage Danse et poésie, le pli du mouvement dans l’écriture : Michaux, Celan, Du Bouchet, Noël entend mettre en évidence le passage de la danse en tant que thème romanesque à la danse en tant que principe d’écriture et de rythmique.
Les bals dans la littérature (17e-20e siècle)
Il s’agit là d’un topos romanesque largement investi par les écrivains de romans ou de pièces théâtrales. Dans un article mis en ligne en décembre 2022 sur le site ViaBooks, Astrid Tanney brosse un rapide panorama des “plus belles scènes de bal de la littérature”. Sont mentionnés dix grands classiques de la littérature du XVIIe au XXe siècle, tels que Roméo et Juliette de Shakespeare (1597), Madame Bovary de Flaubert (1856) ou encore L’Ecume des jours de Boris Vian (1947).
Deux dossiers pédagogiques, tous deux consacrés aux scènes de bals dans la littérature romanesque, peuvent également être consultés en ligne : l’un est disponible sur le Manuel numérique Max proposé par Belin Education, l’autre est téléchargeable en PDF sur le site Bastide en Lettres.
Vous trouverez dans ces dossiers non seulement un grand nombre d’extraits de romans, mais également des éléments explicatifs et contextuels permettant de mieux saisir les enjeux des différents passages. Sont également posées plusieurs questions de réflexion destinées aussi bien aux étudiants qu’aux lecteurs intéressés par le sujet.
Enfin, l’article de Laura Colombo : La parure du texte : toilettes de bal et codes sociaux dans le roman du XIXe siècle (2015), s’intéresse plus spécifiquement à la “sémiologie” (p.99) du bal ainsi que “ses codes littéraires” (p.99). Dans les différentes œuvres citées par l’auteure, la toilette, les bijoux, les tissus et les accessoires féminins sont indissociables d’enjeux moraux, sociaux ou sentimentaux.
Un genre littéraire singulier : les livrets de ballet
L’article “Livret” de l’Encyclopédie Larousse en ligne propose de définir celui-ci comme un “ouvrage littéraire, en vers ou en prose, destiné à être mis en musique en vue de la composition d’un opéra, d’un opéra bouffe, d’un opéra-comique, d’une opérette ou d’un ballet”. A la croisée du spectacle et de la lecture, de la danse et de la littérature, le livret de ballet érige un pont entre ces deux disciplines artistiques initialement distinctes.
L’ouvrage collectif Formes, emplois et évolution du livret de ballet de la Renaissance à nos jours paru en 2021 aux éditions Classiques Garnier retrace l’évolution de cet objet littéraire singulier du XVIe au XXIe siècle.
Aux mêmes éditions est paru en 2022 un essai de Delphine Vernozy également consacré au livret de ballet. Son titre, Le Livret de ballet, un objet littéraire ?, est
hautement révélateur de la démarche de l’auteure : cette dernière interroge en effet la valeur littéraire – c’est-à-dire narrative, esthétique, etc. – de ce genre “a priori éphémère”.
Littérature, danse et opéra
Certains auteurs se sont particulièrement intéressés à l’univers de la danse et de l’Opéra. C’est le cas de Théophile Gautier, romancier, poète, critique chorégraphique et auteur de plusieurs livrets de ballets romantiques. Dans son ouvrage Théophile Gautier et la danse paru en 2010 aux éditions Honoré Champion, François Brunet se propose d’étudier “l’importance de la danse dans la vie et l’œuvre” de cet auteur. C’est également ce que fait Louise Hingand dans un travail d’études et de recherche Les livrets de ballet de Théophile Gautier effectué en 2017.