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D’où vient l’expression  » années folles  » ?

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    Bibliothèque de Reims – notre réponse du 02/20/2007, actualisée le 28/06/2024.

    Dessin en couleurs de Manuel Orazi représentant une scène de bal dans un dancing de Montmartre au temps des années folles
    Dessin de Manuel Orazi via Wikimedia Commons

    « Les  » Années folles  » sont un chrononyme, autrement dit, à l’instar de la  » Belle Époque « , des  » Trente Glorieuses  » ou encore des  » années de plomb « , une expression par laquelle nous avons pris l’habitude de nommer une période du passé, recouvrant la réalité historique sous un imaginaire culturel et social. » (source : Les Années folles de Myriam Juan, Que sais-je ?, Presses Universitaires de France, 2024). Alors d’où vient l’expression  » années folles  » ?

    « Années folles », une expression venue des États-Unis

    Dans son ouvrage 1922-1929 Les années folles ? (éd. Perrin, 2022), l’historien Jean-Yves Le Naour indique que l’expression « années folles » semble être née aux États-Unis. Elle est mentionnée pour la première fois en France dans la revue L’Œil de Paris du 02/01/1932.

    « Même si on la rencontre parfois dans la littérature du XIXe siècle pour désigner la fête permanente de la Régence, l’expression « années folles » appliquée aux années 1920 apparaît pour la première fois en 1932. La revue L’Oeil de Paris attribue la paternité aux États-Unis plongés dans la dépression. Empêtrés dans la crise, les Américains regardaient l’insolente croissance des années 1920 avec envie. Maurice Prax, dans Le Petit Parisien du 29 octobre 1932, ne voit pour sa part dans les « années folles qui ont suivi la guerre » qu’une époque de facilité où l’on pouvait s’enrichir facilement. L’expression, née dans le marasme économique, renvoie donc d’abord aux regrets ou à la critique des années exceptionnelles d’expansion, et certainement pas à la fête. […] De l’économie on passe cependant à la culture, dès 1934, quand L’Excelsior utilise l’expression pour évoquer le foisonnement des artistes après guerre, aussi nombreux « que les galets sur la plage », une interprétation validée par Comoedia qui regrette « le bon vieux temps, les années folles où la pluie d’or tombait comme une manne sur les peintres ». »

    Une note de l’ouvrage Les Années folles de Myriam Juan (Que sais-je ?, Presses Universitaires de France, 2024) nous apprend que, d’après le catalogue de la Bibliothèque nationale de France, Le Théâtre des Années folles de Paul Brisson (Éditions du Milieu du monde, 1943) marque la première occurrence de l’expression en titre d’un ouvrage.

    L’utilisation de cette expression en France

    Une expression qui se répand dans la société à partir des années 1950

    Il faut attendre la fin des années 1950 pour que l’expression « années folles » commence à s’implanter et à se définir clairement.

    « L’expression demeure toutefois assez rare dans les années 1930 et comporte même une bonne dose d’ambiguïté […] Ce n’est que dans un second après-guerre, à partir de la fin des années 1950, que les années folles ont commencé à s’imposer, avec des bornes chronologiques claires, de la guerre à la crise, et un sens désormais précis, celui de l’étourdissement permanent d’une société qui veut profiter de la vie. »

    1922-1929 Les années folles ? de Jean-Yves Le Naour, éd. Perrin, 2022.

    Des œuvres qui popularisent l’expression

    Le journaliste François Roche explique que l’expression est largement popularisée par la parution du livre Les Années Folles de Gilbert Guilleminault aux éditions Denoël en 1958. Dans les années 60 et 70, le chrononyme des « années folles » se popularise. Il est repris par des artistes comme Robert Charlebois (Les Années folles, 1967) ou encore France Gall (Les Années folles, 1973).

    « Cette expression a commencé à être popularisée dans les débuts de la Cinquième République, lorsque le journaliste Gilbert Guilleminault publie en 1958 Les Années Folles, un livre qui s’insère dans la collection Le Roman Vrai de la Troisième République publiée à partir de 1958 par Robert Laffont. La locution se banalise dans les années 60 et est reprise par des artistes comme Robert Charlebois et France Gall. L’expression s’impose aussi comme un marqueur de l’histoire des arts. « Années Folles est donc bien, pour l’essentiel, la fille des années 60 et 70 », écrit Emmanuelle Retaillaud, dans un ouvrage collectif consacré aux chrononymes. »

    Nos nouvelles années folles (1/4) : De la grippe espagnole au Covid, l’éternel recommencement par François Roche, L’Express, 22/07/2021.

    « Les années folles » est également le titre d’un film de 1960 réalisé par Henri Torrent et Mirea Alexandresco. Ce film réunit des images d’archives de Gaumont et Pathé journal datant des années 1920. Un extrait est disponible sur le site de l’Institut national de l’audiovisuel (INA) : Les années folles de Henri Torrent et Mirea Alexandresco, Cinq colonnes à la une, INA, 06/05/1960.

    « Cette expression, qui fut d’abord le titre d’un film sur les années 20, réalisé en 1960 par Mirea Alexandresco et Henri Torrent, s’imposa car elle résumait bien la multiplicité vivante d’une époque dont nous ne cessons de redécouvrir les innombrables facettes. Aujourd’hui, des essayistes, des historiens, mais aussi des couturiers et des publicitaires ou des musiciens la reprennent fréquemment, sensibles à l’aura qui entoure cette fabuleuse décennie. »

    Les années folles de Michel Collomb, éd. Belfond, 1986.

    Pour aller plus loin…

    Si vous souhaitez en savoir plus sur la décennie des « années folles », nous vous conseillons les ouvrages :

    • Les Années folles de Myriam Juan, Que sais-je ?, Presses Universitaires de France, 2024.
      Résumé : « Une synthèse sur les bouleversements culturels qui se sont produits dans les années 1920, entre avant-gardes artistiques et éclosion de la culture de masse. » ©Electre 2024
    • 1922-1929 : les années folles ? de Jean-Yves Le Naour, éd. Perrin, 2022.
      Résumé : « Un panorama des Années folles, associées dans l’imaginaire collectif à une période de réjouissances et de prospérité culturelle. L’auteur montre néanmoins qu’avant même la Grande Dépression de 1929, la décennie 1920 s’avère désolante et encore marquée par les conséquences de la Première Guerre mondiale. » ©Electre 2022

    Nous vous recommandons aussi :

    • Le documentaire La France de l’entre-deux-guerres de Romain Icard, 1919-1929 : la grande illusion, France Télévisions et Nilaya Productions, France 5, 2019.
      Résumé : « En 1919, après quatre années d’enfer, les Français comptent leurs morts mais revivent, après la victoire. Guidés par l’espoir et le désir de reconstruire, ils plongent dans le XXe siècle et dessinent un chemin vers la modernité. Le monde rural laisse place à la ville. L’artisanat est remplacé par l’industrie. Les femmes défient le patriarcat et s’affranchissent des codes du passé. La France devient la patrie des artistes. C’est une décennie de temps agités et heureux. Mais cette parenthèse est de courte durée. Bientôt, l’euphorie laisse place à l’effroi, avec l’approche du second conflit mondial. »
    • Le podcast 1918, après la guerre les années folles de Stéphane Bonnefoi, réalisé par Diphy Mariani, Radio France, 2018-2021.
      Résumé : « Exploration des années folles au travers de 4 épisodes : les traumatisés de guerre et les débuts du traitement par la psychanalyse, l’avènement du pétrole, les écrivains américains à Paris et le roman de Victor Margueritte « La Garçonne » pour comprendre la place des femmes dans les années 1920. »

    EurêkoiBibliothèque de Reims


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