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Comment est-on passé des sirènes oiseaux au sirènes poissons ?


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    Bibliothèque publique d’information – notre réponse actualisée le 27/07/2024.

    Détail d'un stamnos attique à figures rouges représentant Ulysse et les sirènes.
    Domaine public, via Wikimedia Commons

    Les Sirènes (Σειρήνες / Seirènes) sont des créatures mythologiques à demi-femmes et à demi-oiseaux. Apollodore nous dit d’elles dans son Epitomé (VII, 18) : « De la taille aux pieds, elles avaient l’aspect d’oiseaux. »
    Plusieurs versions entourent leur généalogie.
    Alors que les sirènes-oiseaux sont apparues dans la mythologie grecque antique, les sirènes-poissons seraient intervenues, quant à elles, dans la mythologie nordique. On retrouve parfois une cohabitation de ces deux représentations. Focus sur une sélection de références documentaires pour en savoir plus.

    C’est en tombant dans la mer, dit-on, que les sirènes oiseaux sont devenues poissons. En fait, la métamorphose a lieu par croisement de la sirène ailée avec la femme de mer des légendes nordiques. Sa mue s’effectue dans les bestiaires médiévaux. Confronté à la double tradition, l’un opte pour la femme-oiseau, l’autre pour la femme-poisson.

    Exposition en ligne Monstres marins p9/21, sur expositions.bnf.fr

    Des sirènes femmes aux femmes oiseaux

    Le mythe de la sirène prend ses origines dans la Grèce Antique. D’après Homère, en Sicile, des créatures mi-femme mi-oiseau s’en prennent aux marins égarés. Elles chantent et jouent de la musique pour les attirer, leur faire perdre le contrôle de leur bateau jusqu’à ce que celui-ci se fracasse sur les récifs. (…) Homère ne nous décrit d’ailleurs pas vraiment les sirènes. Il les décrit simplement comme des femmes aux voix enchanteresses, au bord de mer. C’est Ovide, dans Les Métamorphoses, qui nous les décrit. Il nous parle de femmes ailées, à moitié humaine, à moitié oiseau donc. On est loin de la sirène réellement rattachée à l’eau. Elles sont surtout des créatures de l’air à cette époque là. 

    Le mythe de la sirène et l’évolution de son image à travers les époques – Une Brève Histoire d’Art

    De quand date la sirène poisson ?

    De quand date la sirène poisson ? par Odette Touchefeu-Meynier Bulletin de l’Association Guillaume Budé : Lettres d’humanité, 1962, (Vol 21) , n°4, p 452-459.

    Extrait :

    Très vivace, ce type de femme-oiseau, apparu dans le monde grec vers la première moitié du VIIIe siècle avant J.-C., se maintient jusque très avant dans le Moyen âge, laissant progressivement la place, et comme à regret, à la sirène-poisson. Premier texte signalant une Sirène-poisson, le traité De monstris date du VIe siècle après J.-C, et les artistes semblent avoir été plus réticents encore, puisque, jusqu’à présent, l’on a pas trouvé de sirène à queue de poisson antérieure aux XI-XIIe siècle.

    Passage d’une représentation à une autre : un long processus

    Pour bien comprendre le passage d’une représentation à l’autre, il faut savoir que même si les Sirènes constituent une figure centrale de l’Odyssée, Homère ne donne aucune description des sirènes. Dans l’Odyssée il est juste expliqué que les sirènes sont statiques et que le danger se trouve dans leur chant ensorcelant. Quand Circé parle des Sirènes à Ulysse pour lui conseiller de les fuir, c’est leur voix qu’elle mentionne comme vecteur de leur dangerosité.

    Mais bien fou qui relâche pour entendre leurs chants ! Jamais en son logis, sa femme et ses enfants ne fêtent son retour ; car, de leurs fraîches voix, les Sirènes le charment, et le pré, leur séjour, est bordé d’un rivage tout blanchi d’ossements et de désirs humains dont les chairs se corrompent. (vers 41 à 46)

    Les sirènes, femmes-oiseaux à la voix ensorcelante sur odysseum.eduscol.education.fr

    Peu à peu, on se rend compte que l’iconographie traduisant l’épisode du chant XII évolue car les épisodes de l’Odyssée ont des origines diverses et lointaines, leur unité étant donnée par le voyage d’Ulysse. Il faut préciser que toutes les anecdotes où intervient le merveilleux se regroupent autour de la mer. Dans ce contexte, le mythe des sirènes a subi les influences d’autres récits maritimes, et la place de cet épisode juste avant les Pierres Planctes, puis entre Charybde et Scylla facilita l’admission des sirènes dans le folklore de la mer.
    D’autres interprétations du mythe se sont ensuite greffées à cette évolution (chant des sirènes, bruit du ressac sur les récifs, les sirènes démons de midi frappant les marins d’insolation), ainsi que d’autres légendes comme « La mort des sirènes » tirée des légendes du Cycle Troyen de Ch.Vellay où il est dit que de dépit, les sirènes se jettent à la mer.

    Pour aller plus loin…

    La mer mystérieuse : mythes, croyances et récits fabuleux de Jean Merrien, Royer, 2004.
    Résumé :
    Répertorie les croyances, les légendes et les récits fabuleux portant sur plus de 200 sujets différents, répartis en trois grands chapitres : la terre, les rivages, les îles, la marée et l’eau salée , ensuite, les êtres fantastiques, les monstres et les animaux marins , enfin, le temps, la pêche, les marins et les navires fabuleux.

    Le mythe des sirènes de Spina Luigi, Bettini Maurizio, Belin, 2010.
    Résumé :
    L’ouvrage est composé d’une nouvelle introduisant les personnages et mettant en lumière un aspect peu connu du mythe, suivie d’une analyse du mythe antique, de lectures sur son évolution et d’un cahier iconographique commenté.

    Bestiaire du Moyen Âge : images de la réalité et réalités de l’imaginaire de René Cintré, Éditions Ouest-France, 2022.
    Résumé :
    Une étude des animaux familiers au Moyen Age (l’ours, le loup, le cochon, le chien, le chat, l’oiseau, les abeilles, les insectes, etc.), de leurs représentations allégoriques et de leur rôle dans la vie quotidienne, mais aussi des créatures imaginaires telles que l’onocentaure, le phénix, le licorne, le griffon, le basilic ou la sirène. ©Electre 2022

    Les sirènes ou Le savoir périlleux : d’Homère au XXIe siècle par Hélène Vial, Presses universitaires de Rennes, 2014.
    Résumé :
    Le mythe des sirènes, relaté par Homère dans le chant XII de L’Odyssée, est présenté comme le symbole de la dangerosité de la recherche du savoir, et constitue le point de départ de nombreuses réécritures. Les auteurs étudient les causes, les modalités et les effets de la récurrence du mythe fondateur de la connaissance périlleuse dans l’histoire de la littérature.
    Textes issus du colloque international éponyme tenu à la Maison des sciences de l’homme de Clermont-Ferrand, 21-22 mars 2013


    Eurekoi – Bibliothèque publique d’information


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